Simplification du droit des successions : l’envoi en possession se déjudiciarise
Pour désigner un légataire universel, quatre formes de testaments sont reconnues en droit français :
– Le testament authentique
– Le testament olographe
– Le testament mystique
– Le testament international
La forme authentique est considérée comme la plus sûre, car elle nécessite la présence de deux notaires (ou d’un notaire assisté de deux témoins). Pourtant, elle est loin d’être la plus plébiscitée par les testateurs : seuls 15 % d’entre eux choisissent le testament authentique.
Si les testaments olographes et mystiques constituent donc les 85 % restants, ils peuvent néanmoins compliquer le règlement de la succession pour le légataire universel. En effet, ils obligent ce dernier à engager une procédure d’envoi en possession lorsqu’il n’y a aucun héritier réservataire connu.
Jusqu’ici, la procédure prenait plusieurs mois (voire plusieurs années en cas de contestation), obligeait à systématiquement passer par le tribunal de grande instance du domicile du défunt, tout en étant assisté d’un avocat. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 est venue modifier cette situation
1) en ajoutant 2 alinéas à l’article 1007 du Code civil : le premier prévoit le dépôt du procès-verbal et du testament au greffe par le notaire dans un délai d’un mois, tandis que le second permet à toute personne intéressée par la succession de s’y opposer dans le mois qui suit ce dépôt.
2) en abrogeant l’article 1008 du Code civil.
Concrètement, l’envoi en possession est devenu l’exception, là où il constituait la procédure normale avant la loi du 18 novembre 2016. Cette disposition se trouve dans le titre IV de la loi dont le nom à ce sujet est révélateur : « recentrer les juridictions sur leurs missions essentielles ». Dans la logique globale de modernisation du droit prévue par ce texte (et les travaux préparatoires du Sénat sur le sujet), le législateur entend confier au notaire le contrôle de la saisine du légataire, en recentrant les juridictions sur la seule partie contentieuse de ces successions. C’est donc lui qui sera désormais chargé de contrôler l’absence d’héritier réservataire, la réalité du legs universel, le respect de la procédure et la validité du testament… ainsi qu’il le faisait déjà très bien pour les autres successions. Confier cette mission au notaire permet également d’éviter certains redondances du traitement juridique de l’envoi en possession, comme l’envoi au tribunal du procès-verbal de dépôt du testament alors que ce dernier a déjà été transmis en application de l’article 1007 du Code civil.
Pour les légataires universels, cette simplification de la procédure pourra avoir de nombreuses conséquences favorables quant à la succession. Outre l’économie pécuniaire d’un recours à un avocat pour faire une requête auprès du TGI, la diminution drastique dans la durée via le traitement par le notaire risque d’éliminer quelques problèmes d’ordre pratique ; le légataire universel ne pouvant bénéficier de la succession le temps de la procédure, il peut lui être toutefois demandé le règlement de certains frais et arriérés relevant de la gestion courante des biens du défunt, par exemple. Aussi, les droits de succession doivent être réglés à l’administration fiscale dans un délai de 6 mois après le décès du défunt, suite auxquels des pénalités de retard peuvent être appliquées. Il n’est pourtant pas anormal qu’une procédure devant un TGI puisse dépasser cette durée, contrairement à une validation par le notaire.
Les modalités d’application du texte n’étant en revanche pas encore bien définies, elles seront précisées par décret en Conseil d’État d’ici le 01 novembre 2017.